Soléna CHENY

 

   
Nom Cheny
Prénom Soléna
Année de thèse 3e année
Directeur Mr Yves MODERAN  et Mr Abdallah BOUNFOUR
Thème de recherche La résistance berbère à la conquête arabe en Afrique du Nord (642-711) : de l’histoire au mythe

 

Résumé :

La résistance des populations appelées « berbères » face aux armées musulmanes lors de la conquête de l’Afrique du Nord (642-711) tient, par sa durée et la vaillance de ses protagonistes, une place particulière dans l’historiographie arabe médiévale. Malgré leur conversion, plus ou moins rapide, à l’Islam, et leur engagement précoce dans l’entreprise de conquête de l’Espagne, malgré ensuite leur participation à l’épanouissement de la civilisation « arabe » en Occident, le souvenir des combats menés par de grandes tribus comme les Masmûda ou des chefs comme  Koceïla et la Kahena n’a jamais été occulté, et a même au contraire été amplifié entre le IXe et le XIVe siècle, en prenant parfois une véritable dimension mythique. Plus tard, à l’époque coloniale, celle-ci a alimenté à son tour une très abondante littérature historique ou romanesque, non dénuée parfois d’arrière-pensées politiques, mais qui connaît, sous une forme plus ou moins nouvelle, de remarquables prolongements dans la culture berbère contemporaine.

Notre thèse se donne pour objectif de comprendre le succès de cette histoire mythifiée, en remontant à ses origines. Pour analyser et expliquer les différentes composantes du thème de la résistance berbère et leur évolution dans le monde musulman entre le VIIe et le XVe siècle, nous prendrons en compte la totalité des sources publiées, d’origine arabe ou berbère : historiens d’abord, très nombreux, des plus anciens, encore souvent brefs, comme Khalîfa ibn Khayyât, à Ibn Khaldûn, dont l’œuvre est assurément la plus riche sur ce sujet ; géographes, comme Al Bakrî ou Idrîsi, en raison des nombreuses digressions historiques qui parsèment leurs livres ; mais aussi poètes, juristes etc... Une fois le corpus constitué, nous le soumettrons à un questionnaire multiple. Il portera d’abord sur le rapport entre les faits historiques eux-mêmes et leur représentation : au regard des réalités de la conquête et de la résistance (qui feront donc l’objet d’un essai de mise au point historique préalable, à dimension comparative avec le reste des épisodes de l’expansion musulmane aux VIIe-VIIIe siècles), jusqu’où peut-on parler d’une insistance particulière des auteurs arabes ou berbères sur le phénomène de la résistance berbère ?  Quels événements et quels personnages ont été privilégiés ? Quelles écoles peut-on distinguer ? Sera posée de là la question des origines de nos auteurs, de leurs sources, et des mécanismes de transmission de la mémoire de la résistance berbère. Après avoir ainsi mis en valeur les grandes spécificités du regard des historiens médiévaux sur la résistance berbère, nous tenterons dans une troisième partie de les expliquer, en fonction à la fois de la situation sociale, politique et culturelle de l’Afrique du Nord et du reste du monde musulman médiéval, et de son évolution. Ainsi espérons nous comprendre comment et pourquoi on est passé de l’histoire au mythe.